I. Excès en littérature

1. Définition

En littérature, le terme « excès » désigne une démesure ou un dépassement des normes, des limites habituelles. L’excès est par nature « irraisonnable », que ce soit dans les comportements des personnages, le style d’écriture, les thèmes abordés ou les émotions exprimées.

2. Excès de passion

À la Renaissance, des personnages de la littérature peuvent être dominés par des émotions incontrôlables (amour, haine, jalousie, etc.). La pièce tragique Phèdre (1677) de Racine donne l’exemple d’une femme consumée par un amour interdit envers son beau-fils (Hippolyte), qui la conduira à s’empoisonner.

3. Excès de violence

Dans le drame élisabéthain King Lear (1606) de Shakespeare, le comte de Gloucester est horriblement mutilé par crevaison des yeux. Ces explosions de colère peuvent parfois s’apparenter à de la folie. Ainsi, le roi devient fou et se met à palabrer et à errer nu dans les landes sauvages battues par le vent. La folie devient une sorte de lucidité tragique, car le roi dément prend conscience des souffrances de son peuple.

II. Recherche humaniste de tempérance

1. Chez Rabelais

Si Rabelais incarne à merveille l’excès (débordements scatologiques, énumérations grivoises), il prévoit aussi des limites à son système de pensée. « Mangez, buvez, mais ne vous enivrez point », préconisait-il dans l’introduction de Gargantua (1534). Aux derniers chapitres du même livre, « Fais ce voudras » est l’enseigne de l’abbaye de Thélème, et incite à écouter son corps et son esprit plutôt qu’à les aliéner par la mémorisation poussive des textes médiévaux.

2. Chez Montaigne

Dans le chapitre 30 des Essais (1580), le grand humaniste Montaigne préconisait aussi la tempérance en toutes choses : « La nature nous conduit à un juste milieu. » Ainsi Montaigne reprenait-il à son compte une philosophie aristotélicienne qui peut être condensée dans le bon mot du poète latin Juvénal dans Satires : « Mens sana in corpore sano » (« Un esprit sain dans un corps sain »). La santé spirituelle et la santé physique doivent être intrinsèquement liées, dans un juste équilibre.