La mise en scène d’Ostermeier signe la disparition du « quatrième mur » : la scène demi-circulaire est au milieu du public amenant les comédiens à partager l’espace avec les spectateurs. La disposition est intrusive et laisse place à un Richard III, dont la voix est amplifiée dans ses monologues, raisonne à l’oreille du spectateur, comme si elle faisait partie de lui, produit un sentiment de malaise. Elle abolit toute distance entre le personnage et le spectateur. Ainsi Ostermeier déclare-t-il dans un entretien : « Depuis mes débuts comme metteur en scène, j’ai toujours été́ intéressé par le rapport entre la scène et le public. Je ne fais pas un théâtre d’images, je n’ai pas besoin d’une distance pour que le public perçoive la composition de ma mise en scène. Je souhaite que le public se sente avec les acteurs, parmi les acteurs et les personnages qu’ils interprètent, vraiment à côté d’eux ». L’interprétation du rôle-titre par Lars Eidinger instaure cette relation d’intimité avec le public et tend à le rendre complice de ses vices, de sa perversité, de son machiavélisme et de sa soif de pouvoir. C’est, d’ailleurs, un jeu « vrai » que recherche Ostermeier dans sa mise en scène.
Le malaise du public est favorisé par la conception d’un décor froid, industriel, avec un mur droit accolé à la scène et auquel sont accrochées des poutrelles métalliques, sortes d’échafaudage avec des échelles, soutenant une passerelle accessible de la scène par un escalier. L’ensemble permet ainsi aux comédiens de se déplacer en hauteur et de rendre compte de leur évolution montante ou descendante autour du pouvoir. C’est aussi un moyen, par cet éclatement de l’espace, de lui donner une dimension quasi animale.